Cinquième voyage en Écosse ! Départ pour Glasgow en ce début septembre 2014 avec pour but les Hébrides : Skye tout d’abord puis Lewis and Harris, île au nom de série télé pour ados des années 90 qui a décroché sa place parmi les plus belles du monde. Au retour je ne m’empêche pas un petit arrêt à Glencoe, qui, je l’avoue, m’a beaucoup manqué l’hiver dernier. C’est parti pour une semaine de randonnée, en plus, cette fois, j’ai trouvé un compagnon de route super entraîné !
SHOULD SCOTLAND BE INDEPENDANT ?
Ce cinquième voyage en Écosse a lieu dans un contexte particulier et tout à fait intéressant : le 18 septembre – soit la semaine qui suit – les Écossais seront amenés, pour la troisième fois depuis 1979, à se prononcer sur le statut de leur pays au sein du Royaume-Uni. Le referendum de 1997 avait entraîné la dévolution et la création en 1999 d’un Parlement Écossais ; c’est à la question « l’Écosse devrait-elle être un pays indépendant » que les Écossais vont cette fois devoir répondre.
Si les « Yes » et les « Bu Choir » (« we should » en Gaélique) fleurissent sur Skye, ce sera moins le cas sur Lewis et Harris, où une soirée débat suivie d’un vote fictif organisés par la Gazette de Stornoway durant notre présence aboutira à une égalité parfaite entre les deux camps ! Les enjeux diffèrent d’une région à une autre. L’hiver dernier j’avais rencontré un expat’ espagnol installé à Aberdeen qui m’avait dit attendre ce moment de débat avec impatience, j’avoue que c’est réellement stimulant !
[On en connaît tous aujourd’hui l’issue : c’est le non qui l’a emporté avec 55,3% des voix.]J1 // SKYE ET LE TROTTERNISH
Nous passerons 2 jours sur l’île de Skye, que j’avais déjà parcourue en 2012. Je suis heureuse d’y revenir, c’est un endroit magnifique. Point d’ancrage : l’auberge de jeunesse de Uig. Au programme, de nouveau le Trotternish, péninsule connue pour ses formations géologiques atypiques et particulièrement spectaculaires. C’est d’ailleurs par le Quiraing que nous débutons, soit 7 km pour nous mettre en jambes. Cette randonnée traverse des paysages réellement impressionnants. Avant de repartir, nous nous posons sur un promontoire rocheux pour pique-niquer tout en profitant de la vue. Notre point de chute se révèle également être un bon poste d’observation des marcheurs et des photographes, nombreux à planter leur trépied dans l’espoir que LA lumière ne soit ! Le temps se couvre, cela semble compromis.
Petit tour dans Portree pour faire les emplettes nécessaires à notre survie (café, carot-cake, cheddar et soupe…). On s’arrête aussi discuter au siège local du « Yes », et parce que la France et l’Ecosse ont cet ennemi commun, nous décidons que ces derniers doivent s’émanciper du joug de l’Angleterre ! Chocolat chaud au café Arriba et départ pour une nouvelle rando, non sans s’être arrêtés à Kilt Rock, falaise qui doit son nom à la forme de ses colonnes basaltiques. L’observation est fugace, le site est aménagé pour des bus de touristes qui vont et viennent.
Cap au nord, vers le Rubha Hunish, petite langue de terre qui va se perdre dans le Little Minch. Le terrain est bon et la balade, que je découvre, est agréable. Pas de difficulté majeure sur ce parcours si ce n’est la descente qui mène au dernier tiers de la pointe et qui se fait à la faveur d’éboulis dans la falaise. Si vous avez le vertige, si devoir mettre les mains au sol pour vous aider à progresser sur un chemin n’est pas un kiffe ou en cas de temps incertain, il sera probablement préférable de rester en hauteur, voire de s’abriter dans le petit bothy, ancien poste de garde-côte, qui surplombe la falaise.
J2 // A NOUS DEUX LE STORR !
Le lendemain nous avons prévu de marcher autour de l’Old Man of Storr. Un chemin de randonnée permet non seulement d’y accéder mais également d’atteindre le plateau qui le surplombe. Je l’ai déjà tenté il y a deux ans et ai prévenu mon pote : il est hors de question que je rebrousse chemin une nouvelle fois. Le temps n’est pas serein mais le vent permet d’évacuer rapidement les nuages menaçants ; mon acolyte a confiance et il est tout terrain (il a été sélectionné pour ça héhé !) : alors go ! Arrivés sur les hauteurs nous trouvons un spot abrité en rebord de falaise et nous installons pour déjeuner avec une vue imprenable sur le Storr, l’océan, et le Wester Ross. Grandiose ! Et finalement, comme prévu, après avoir atteint le point le plus haut, il nous suffit de suivre le chemin de l’eau pour retrouver le pied de la falaise.
PAUSE GOURMANDE
Nous retournons à Uig savourer notre victoire à l’Hôtel de Uig, où vous pouvez boire un verre même si vous n’y séjournez pas. Puis il est temps de se rendre au port, prendre le ferry pour Lewis et Harris. La voiture dans la file d’attente, les billets contrôlés, nous avons un peu de temps avant d’embarquer et décidons de fureter dans une boutique de spécialités du coin. Nous ressortons avec un petit sachet étiqueté « Skye Fudge Company ».
C’est local, c’est à tenter et c’est… WAOUH ! Mais c’est incroyablement bon ! En tant que végétarienne, il m’est difficile d’apprécier la grande spécialité culinaire Écossaise, à savoir le Haggis, mais j’avais su trouver mon bonheur ailleurs avec le « Millionnaire », un gâteau fait de la superposition de shortbread, de caramel et de chocolat (un met particulièrement léger comme vous pouvez le constater). Je découvre donc la « Scottish tablet« , mélange de beurre, de sucre et de lait concentré (également très léger donc !). Cela donne une friandise au goût de caramel très doux, à la texture sableuse et fondante. Mais comment ai-je pu passer à côté de ça ???
EN ROUTE POUR LEWIS ET HARRIS
Le ferry au départ de Uig nous déposera 1h45 plus tard à Tarbert, principale ville de Harris. Elle n’est en soi pas un objectif touristique majeur, mais a cet intérêt que l’on y trouve des commerces et de quoi prendre un café (et donc des « commodités ») ainsi qu’un office de tourisme dans lequel nous trouvons les cartes de randonnées qui vont bien, parce que, une fois n’est pas coutume, je n’ai pas pris le temps d’aller farfouiller sur Walkhighlands.
Juste un point sur notre hébergement sur l’île (attention, moment d’émerveillement naïf…). J’avais voulu réserver dans une auberge communautaire à Kershader depuis internet mais le site avait bogué. Le responsable m’avait donc simplement répondu ok suite à un échange de mails.
Nous arrivons dans la soirée. L’AJ est petite, personne n’est là pour nous accueillir. Moment d’angoisse (ai-je zappé un élément primordial du genre « vous devez arriver avant telle heure », ou « envoyez-moi des arrhes » ???) non, pas d’information manquée, nos noms sont indiqués sur la porte d’une chambre et les lits sont même faits. Tout est parfait !
Nous ne verrons personne de notre séjour et partirons en laissant l’argent au magasin voisin. C’est tellement à mille lieux de nos façons de vivre (enfin en tout cas pour moi qui habite en Île-de-France), cette confiance (ni les chambres, ni l’auberge n’étaient d’ailleurs fermées à clé) ! Vraiment, si vous ne craignez pas les chambres mixtes et que vous souhaitez échanger avec des randonneurs et des amoureux de la nature, je vous conseille cette petite auberge de jeunesse, qui par ailleurs donne sur le Loch Erisort, sublime au lever du soleil et peuplé de loutres.
J3 // LES PLAGES DE HARRIS
Wa-ouh ! Que dire de plus ?
C’est sur la plage de Luskentyre que nous passons toute la matinée, à flâner, à profiter. Le sable blanc, l’eau turquoise, le « machair » vert tendre et les montagnes sombres en écrin sont sublimés par une lumière d’automne qu’anime la ronde de nuages. Ce lieu mêle calme et puissance. Ce sont ces plages qui ponctuent les côtes de Lewis et Harris qui lui ont valu sa place parmi les plus belles îles du monde. Il faut dire qu’elles sont totalement improbables dans cet univers lunaire. Le contraste est saisissant, tout comme la température de l’eau ! La baignade, ce sera pour un autre jour ! Nous quittons ce lieu à regret mais nous retrouverons une petite plage plus au sud pour profiter du coucher du soleil.
PREMIERE PRISE DE HAUTEUR
Nous suivons la côte ouest du sud Harris en direction de Northton avec Ceapabhal en point de mire. Ce sera notre première grimpette sur l’île. Le sommet est situé sur la presqu’île Toe Head, on y accède par une langue de machair pâturée qui sépare deux plages de sable blanc. Nous venons de passer une première porte lorsque nous tombons sur des bergers manœuvrant pour rassembler les moutons. Nous nous installons en retrait pour les regarder travailler.
En Écosse, la tradition veut que le marcheur ait accès à tous les espaces extérieurs, qu’ils soient publics ou privés. Les chemins de randonnée traversent souvent des terres agricoles et passer au milieu d’un troupeau de moutons ou de vaches n’est pas rare. Il tient juste à chacun de respecter les lieux, les activités qu’il héberge et de s’assurer de sa propre sécurité. Les droits et devoirs des randonneurs sont spécifiés dans le Outdoor Access Code.
Parce que je n’ai pas pu tracer la route sur la carte avant de partir, on part un peu à l’aveugle, mais une chose est sure : on est en bas et on veut aller en haut. On choisit donc le chemin le plus direct (soit la technique dite de la voie romaine !). Sur notre versant de la colline la bruyère, en fleur, abonde. Et puis c’est le sommet. La vue est imprenable tant sur l’océan que sur l’île. Le soleil qui commence à décliner offre une lumière caractéristique des contrées nordiques. Nous avons même le droit à un arc en ciel là où le vent charrie l’eau ! Nous serions bien restés plus longtemps sur ce promontoire si ce n’était le jour, qui tombait rapidement. La descente se fera par un autre versant, moins abrupte. Oh, des vaches… quand je vous disais que ce n’est pas rare !
J4 // PORT OF NESS ET LA CHASSE AU GUGA
Le lendemain est couvert… ok, c’est même pluvieux ! Nous décidons de faire cap au nord, pour explorer Lewis et ses grandes étendues. La tourbe est encore utilisée comme combustible et son exploitation marque le paysage. Rapide passage à Stornoway puis route en direction de Tolsta vers un pont qui ne mène vers nulle part ! C’est d’ailleurs son nom : le Bridge to Nowhere a été édifié dans les années 1920 par Lord Leverhulme, alors propriétaire de l’île et qui projetait de continuer la route qui longe la côte en direction de Port of Ness. Aujourd’hui vous pouvez faire ce trajet à pied par le chemin empierré qui démarre après le pont. Nous n’irons pas jusqu’au bout, ayant d’autres projets pour la journée. Retour à la voiture en direction de Port of Ness par l’A857.
Lorsque nous arrivons dans ce petit village nous repérons un attroupement sur le port. Des hommes sont en train de plumer et brûler des bêtes, après une observation plus minutieuse il s’avère que ce sont des oiseaux. « Vous avez de la chance d’être là aujourd’hui », nous dit une femme. Ah bon… Elle nous explique qu’il s’agit de gugas et que les hommes reviennent de Sula Sgeir. La chasse au guga est une tradition locale pluriséculaire : tous les ans, une dizaine d’hommes partent deux semaines s’installer sur cette île pour y chasser des jeunes fous de Bassan, appelés « gugas ». Sujet de tension avec les associations de protection des animaux, cette chasse est aujourd’hui très règlementée (un quota de 2000 individus est tout de même autorisé).
BUTT OF LEWIS
Arrêt au café du coin et départ pour Butt of Lewis, le point le plus au nord de l’île. C’est là que nous marcherons cet après-midi. Encore une fois, du ciel chargé émane une lumière intense, révélant toute la splendeur et la dramaturgie d’un site pouvant être en proie à de violentes tempêtes. La mer est déchaînée mais aujourd’hui point de tempête, plus de pluie non plus depuis la fin de la matinée. Départ au pied du phare de Butt of Lewis, bâti par David Stevenson en 1862 (la famille de l’écrivain était réputée en la matière et a bâti un grand nombre de phares en Écosse) en direction d’Eoropie. La balade, sans difficulté, longe la falaise au son, hypnotique, du vent et de l’océan.
THE CALLANISH STANDING STONES
Nous avons tout prévu : la lumière rasante de fin de journée qui vient lécher les mégalithes de Callanish ne pourra que magnifier le site. Coup de chance, le soleil réalise des percées dans les nuages noirs, ça ne peut pas être mieux !
Le site (les sites, il y en a 3) est contemporain de Stonehenge, mais bien moins fréquenté, nous finirons même par être seuls ! La formation principale, la mieux préservée, compose une croix celtique : d’un cercle de pierres central émanent des alignements dirigés selon les points cardinaux. Nous partons à la recherche des deux autres avant qu’il ne fasse totalement nuit. Elles sont situées non loin, dans des prés.
Les nuages se densifient, d’un coup la pluie s’abat sur nous. La douche écossaise porte bien son nom, nous sommes trempés en moins de temps qu’il ne faut pour le dire ! Tous aux abris !!!
J5 // A L’ASSAUT DU PLUS HAUT SOMMET DE L’ILE !
Bon, je le sais, ce n’est pas la première fois que je me fais avoir et c’est aussi pour cela que j’aime autant ce pays : la signalétique et les aménagements destinés aux randonneurs sont… minimalistes (et mille fois tant mieux !). La veille, la serveuse du café nous a dit que l’ascension du Clisham (799 m. d’altitude) se faisait aisément, le départ se fait au niveau d’un petit parking le long de la route principale. Really easy !
Des petits parkings, il y en a 4 dans ce secteur, les chemins visibles et les seuls panneaux annonçant des départs de randonnées nous mènent dans la mauvaise direction… il y a bien ce parking, le plus proche du Clisham, mais rien ne semble partir de là… Sur la carte de randonnée, point de tracé matérialisé et bien entendu nous avons décidé de nous lancer à la recherche d’un chemin qui n’existe pas un… dimanche ! Autant vous dire que nous sommes livrés à nous-mêmes !
Cette situation me permet néanmoins de faire deux découvertes primordiales : premièrement, les midges sont des êtres délicats, fins gourmets et pas les brutes effroyables que l’on m’avait décrites ; deuxièmement, avec le recul je me rends compte que j’avais déjà rencontré ces petites bêtes lors de mon premier voyage, je les avais juste prises pour des moucherons un peu collants mais somme toute inoffensifs.
Je vous vois vous frapper la tempe avec l’index, mais le fait est que, debout devant une plaque d’orientation, cherchant désespérément un chemin que tout le monde semble trouver aisément sauf nous, j’ai échappé à la (certes mini) horde qui s’est par contre abattue sur mon voisin de gauche ! J’ai bien senti quelques picotements, mais rien de visible une fois rentrés dans la voiture, pas un seul de ces boutons qui fleurissaient sur la tête de mon acolyte.
« So you are a repelent », c’est ce que me disait un écossais croisé l’an passé et qui ne voyait que cette explication au fait que j’avais pu camper sereinement dans les Highlands en août. Yes, I am !
Bref, après cette mésaventure, nous décidons que le départ vers le Clisham se fera au pied dudit mont, là où c’est le plus immédiat, que ça passera bien, que de toute manière sur la carte le dessin des courbes de niveau à cet endroit est moins dense et qu’il nous est possible de longer le ruisseau à côté duquel nous nous sommes arrêtés. Il y a bien un parking, pas de chemin, mais un terrain tourbeux qui semble tout de même praticable. Nous nous lançons et trouvons rapidement des traces de pas, c’est gagné !
A la tourbe succède un terrain chaotique et pierreux à fort dénivelé, attention donc à ne pas vous lancer si vous n’êtes pas rompu à ce genre d’exercice. La vue au sommet, bien que relativement bouchée par quelques nuages, est saisissante ! Au total (ascension et retour) nous mettrons un peu plus de 4h.
(Si vous souhaitez mieux préparer l’ascension du Clisham que moi, voici deux itinéraires possibles proposés par Walkhighlands : Clisham direct route – parcours que nous avons suivi – et Clish31am Horseshoe)
ET POUR FINIR EN BEAUTÉ…
Nous enchaînons avec une randonnée autour d’Hushinish, au nord-ouest d’Harris. Un hors-série de la Gazette de Stornoway laissé à l’auberge conseille ce coin et y propose une petite balade. La route qui y mène est une véritable montagne russe et il nous faut jongler entre le manque de visibilité derrière les bosses, les « passing-places », les moutons et les vaches, le tout en profitant du paysage duquel nous avons du mal à décrocher le regard ; autant vous dire que nous n’avançons pas bien vite ! On lâche la voiture à côté d’une plage encore une fois paradisiaque ; on pourrait se poser au lieu de retourner crapahuter ?
Et bien non, c’est reparti ! Le lieu est le repère d’un famille d’aigles pygargues qui nous survolent à plusieurs reprises. La balade alterne entre montages, loch en balcon sur l’océan et plages de sable blanc mais notre attention est moindre en cette fin de journée et nous loupons le dernier embranchement… mauvais plan, la remontée finale s’en trouve quelque peu olé-olé… bon, c’est passé !